LABORDE
( Jules )
Le
personnage ( Analyse de Gilles Dubus )
Jacques
Géron
Jules Laborde ( le tigre )
Lorsque nous faisons la connaissance de Jules Laborde dans
“Les voleurs de mémoire”, ce n’est qu’un pauvre clochard borgne. Pour
son malheur, il s'introduit un jour dans une propriété qu'il pense abandonnée
: Le “Gai logis”.
A l'intérieur, le professeur Missotte fait
des expériences sur la mémoire et à besoin d'un cobaye. Laborde est donc
capturé, et Missotte transfère
dans son cerveau, la mémoire de 14 savants qu'il a capturé et tué.
Mais Bob Morane, à la demande de Marine Missotte , la fille du professeur inquiète
de la disparition de son père, enquête et retrouve le professeur.
Et après des péripéties, Bob s'enfuit du “Gai logis” en flamme, laissant
dans la cave le professeur Missotte inanimé et Jules Laborde, prisonnier dans
son assemblage de tubes et de fils (121)
Mais Missotte a réussi à sauver sa créature.
Son rôle dans “La mémoire du tigre” est totalement passif, mais on devine
l'ambiguïté de Laborde avec des mémoires parfois de conviction contraire.
Durant un bref état de lucidité, il appelle Bob à son secours en lui
projetant des images.
Sous la menace, un certain Georges Ausec contraint
Philippe Missotte à lui injecter la mémoire de Kâla , un tigre du Bengale
(124)
Dans “La colère du tigre”, Jules Laborde revient à la lucidité.
La mémoire de Kâla en fait un être impitoyable.
Il écume la région de Grenoble , enlevant des hommes pour en
faire des esclaves dociles après les avoir transformés en sujets obéissants
et sans volonté par introduction d'un appareil dans le cerveau.
Et il leur tatoue le visage de façon à ressembler à un
tigre.
De plus il a développé à un haut degré sa faculté de
projeter des images (jusqu'à 65 à la fois) par les yeux desquelles il peut
voir.
Il se sert de cette faculté pour organiser des hold-up
sanglants dans les banques de la région.
Bob et Bill le traquent jusqu'à son repaire et le forcent à
fuir avec Marine Missotte, qui le suit de son plein gré (125)
Deux ans après, un appel à l'aide de Marine envoi Bob dans
le désert du Nouveau Mexique ou le
Tigre a établi son repaire et où Bob s'introduit (“La tanière du Tigre”).
Suite à un concours de circonstance,
Et contre la promesse de Marine de ne plus tenter de s'échapper,
Le Tigre opère Bob pour littéralement le ressusciter grâce à sa science.
Dans ce roman, le Tigre donne enfin
à Bob ses motivations :
Il veut détruire une civilisation qu'il juge violente pour la
remplacer par une civilisation de paix, proche de la nature.
Lui-même se réfugiera dans l'espace avec une cinquantaine
d'indiens de l'Amazone “destinés à constituer le noyau d'une humanité
nouvelle” (145/131), le temps que ses fusées remplies de gaz mortel
n'empoisonnent quasiment tous les habitants de la terre; et il propose à Bob de
collaborer avec lui.
Ces motivations ne sont pas tellement éloignées de celles de
Monsieur Ming : “Je connais très
bien cette chanson-là.
Je la connais par coeur même.
D'autres que vous me l'ont chantée.
L'air change parfois, mais jamais les paroles.” (145/126)
lui répond Bob.
Et comme pour Ming, les moyens qu'il emploie ne sont pas du goût
de Bob.
Et il ne s'en cache pas : “Ce que j'en pense ? C'est que
vous êtes complètement dingue, mon vieux Jules !” (145/137)
Mais peu à peu, le Tigre change et on assiste à la lente déchéance
du Tigre, qui redevient lentement le clochard Jules Laborde sous les yeux incrédules
de Bob : “Bob pensa qu'il buvait comme un trou et cette faiblesse, chez un
homme comme Laborde, lui parut soudain incongrue, presque monstrueuse.”
(145/126)
Ses mémoires ajoutées disparaissent peu à peu, et il ne
conserve que la sienne, celle de Jules Laborde le clochard, victime du seul élément
que le professeur Missotte n'avait pu tester : le temps qui vient annihiler son
oeuvre.
Laborde se rend compte de son état, et n'est pas mécontent
d'être débarrassé de toutes ses mémoires supplémentaires : “M'en balance.
Puis, c'était pas les projets à Julot. C'était ceux des
aut'gonzes, des quatorze grosses têtes que j'avais dans l'ciboulot et qui se
sont fait les pinces.” (145/177)
Il libère Bob et Marine, les laissant repartir et fait sauter
son repaire avant de disparaître dans le désert, redevenu pour toujours Julot
le clodo (145)
Longtemps après Bob recroise involontairement la route de
Laborde qui a acquit la faculté de se transformer en véritable tigre.
Cette transformation est inconsciente, sous le coup de la colère
le plus souvent (“L'Ombre Jaune et l'héritage du Tigre”).
Mais pour Laborde, le Tigre, c'est irrémédiablement terminé.
Ce n'est plus qu'un pauvre clochard, dépassé par ce qui
arrive et qui ne veut plus être source d'ennuis : “Il ne voulait pas imposer
à nouveau sa présence à Marine, sa présence et le malheur qu'elle entraînait.”
(148/115)
Mais c'est sans compter avec l'Ombre Jaune qui
veut s'emparer de la fabuleuse science du Tigre et qui le capture (148)
On retrouve Laborde, prisonnier de Ming dans "Le soleil
de l'Ombre Jaune".
Ming lui a fait subir une cure de désintoxication, l'a soigné,
lui a rendu la santé morale et physique, et a commencé à s'emparer des
secrets dissimulés au fin fond de ses mémoires.
Mais Laborde s'est découvert un nouveau pouvoir : la télétransportation.
Et grâce aux soins de Ming, il est redevenu le Tigre et
“Monsieur Ming allait s'en apercevoir à ses dépens.” (149/136)
Grâce à ses dons, Laborde parvient à s'évader, et après
avoir trouvé de l'aide chez Marine, il contrecarre les plans de Ming en prévenant
la “Patrouille du Temps” (au fait comment connaît-il l'existence de Graigh
: “J'ai déjà entendu parler de
vous...” (149/172) ?